Un exercice rare : «Libération» a demandé à 25 journalistes de faire l'autocritique de leur métier.
Créé en 2014, le collectif We Report est né d’une prise de conscience. Du besoin de mutualiser les compétences de journalistes indépendants dans plusieurs pays européens. De produire ensemble des sujets multimédia à l’international. Et surtout de redonner du temps au journalisme d’initiative, au terrain et à l’investigation.
The Lab develops prototypes, projects and services that help make information meaningful and promote quality journalism, storytelling and content on the internet.
En lisant la presse, on a souvent l'impression que c'est le cycliste qui est en tort en cas d'accident.
Les procédés de communication ont été analysés dans une thèse de doctorat, et sont résumés dans cet article.
Je vous remercie de votre attention, mais ai l’honneur de refuser cette distinction. Elle me parait tout à fait incompatible avec l’exercice du métier de journaliste, dont un principe de base est, pour assurer sa liberté, de se tenir à distance des personnes de pouvoir et d’en refuser les avantages ou distinctions qu’elles voudraient lui prodiguer.
« Pour le dire franchement, les médias ont raté le sujet, a ainsi estimé Margaret Sullivan, éditorialiste média au Washington Post. Au final, un large nombre d'électeurs voulaient quelque chose de nouveau. Et bien qu'ils l'aient crié, hurlé, la plupart des journalistes n'ont pas écouté. Ils ne l'ont pas saisi. »
C’est, pour le dire autrement, proprement dramatique. Où sont les journalistes s’ils n’entendent pas leurs contemporains crier et hurler ? Il va leur falloir abandonner un instant leurs claviers et leurs écrans. Et (ré)apprendre à entendre les désespérés, les insensés. A partir de quand cette profession s’est-elle gentrifiée ? Depuis quand a-t-elle abandonné l’enquête, la filature, le reportage, cette sainte triade de ses aînés ?
En comparaison avec leurs confrères français, les médias belges sont un modèle de réserve dans les enquêtes terroristes en cours. Cela n’empêche pas le Ministre de la Justice, Koen Geens, de vouloir doubler les peines en cas de fuite d’informations et de soumettre à des écoutes son propre personnel de sécurité, avertissant par ailleurs que le secret des sources journalistiques n’est pas sacré dans le cadre des affaires de terrorisme. En résumé, c’est une culture officielle de la défiance que décrète le gouvernement. Oubliées, toutes les annonces sur un manque de personnel de sécurité et de magistrats. Les agents ne vont plus placer des écoutes chez les terroristes mais chez d’autres agents, après quoi les magistrats poursuivront également les agents et les journalistes. Dans quel but ? Nous empêcher de savoir que la police sait que les bars gays constituent des cibles potentielles.
"Que des travailleurs se battent pour préserver des conditions de travail leur permettant de réaliser au mieux leur mission ne paraît pas être déraisonnable. (...) Peut-être vous faudrait-il reconsidérer les priorités. Oser dire qu’il s’agit de privilèges d’un autre temps est l’aveu d’un aplatissement complet devant l’idéologie dominante. Nous en sommes gavé, mais c’est à vous, à votre métier, que devrait revenir le rôle de sentinelle en décryptant ce logos, cette raison folle qui pousse l’humanité à sa destruction. Cette balle, c’est vous qui la tirez dans le pied du journalisme."
"Le champ journalistique, comme beaucoup d’autres, ne peut fonctionner qu’au prix de ce qu’il faut bien appeler une forme objective d’imposture, en ce sens qu’il ne peut faire ce qu’il fait, à savoir contribuer au maintien de l’ordre symbolique, qu’en faisant comme s’il ne le faisait pas, comme s’il n’avait d’autre principe que l’utilité publique et le bien commun, la vérité et la justice. S’agit-il d’hypocrisie ou de tartuferie ? Non. Aucun système quel qu’il soit ne peut fonctionner sur le mode de l’imposture intentionnelle et permanente. Il faut que les gens croient à ce qu’ils font et qu’ils adhèrent personnellement à une idéologie socialement approuvée."
[Les lanceurs d’alerte, ces personnes qui dénoncent les comportements inappropriés ou illégaux dont ils ont connaissance au sein des entreprises ou des organismes dans lesquels ils travaillent] sont désarmés face aux pressions exercées par les multinationales qu’ils dénoncent”, affirme-t-il, “car ces dernières disposent de ressources quasiment illimitées pour les bloquer à coups de plaintes et de procédures longues et coûteuses, qui leur prennent tout leur temps et réduisent à zéro leur employabilité.
Le Guide pratique du journaliste en période électorale, conjointement élaboré par l’OIF et et RSF, vise à préparer les journalistes pour qu’ils effectuent leur travail - celui d’informer les électeurs et de leur permettre un choix personnel libre et éclairé - avec un professionnalisme et une déontologie sans faille.
"C’est un journal qui arbore fièrement son « Prix Google/Sciences Po de l’innovation en journalisme 2014 », mais qui ne risque pas de gagner le prix de l’excellence sociale. Ijsberg, média web (français), propose à ses lecteurs de prendre leur temps pour lire de longs reportages « calmement ». Du calme et de la patience, il en faut manifestement aussi pour les pigistes qui y travaillent : salaires payés très en retard (quand il sont payés), publication des mois après réception de l’article, paiement des piges sur factures (plutôt qu’avec des fiches de paie), etc.
Emballés par la promesse, vendue par les fondateurs, d’un média qui se voulait novateur, faisant large place à des sujets non traités ailleurs et ouvert à la collaboration de journalistes débutants, certains pigistes d’Ijsberg ont payé cette ouverture au prix de conditions de travail déplorables. Aujourd’hui, ils mènent campagne pour faire valoir leurs droits."
« Rire ou ironiser à propos de certains événements internationaux ? Pourquoi pas. Mais dans ce cas précis, inutile de prétendre que l’on informe…
[...]
Martin Weill et ses équipes sont, il est vrai, régulièrement confrontés à des situations difficiles, voire dangereuses, et ils n’hésitent pas à prendre des initiatives et des risques pour rapporter images et témoignages originaux, contrairement à certains experts qui glosent depuis les studios parisiens sur à peu près tous les sujets d’actualité internationale. Mais le « terrain » ne fait pas tout, et la séquence « information internationale » du « Petit Journal » est finalement à l’image de l’émission elle-même : absence de frontière claire entre information et divertissement (au détriment de la première), priorité accordée à la quantité et non à la qualité, recours (volontaire ou non) aux clichés, raccourcis et approximations, mise en récit et mise en scène destinées à valoriser le journaliste, etc. C’est ainsi que l’information elle-même est bien souvent reléguée au second plan, d’autant plus qu’elle est emportée par le flot des séquences que le « Petit Journal » enchaîne à un rythme toujours plus effréné. »
"Paradoxe : le fact-checking peut sembler utile dans une société fracturée où la vérité est éclatée entre différents camps. Mais il ne fonctionne réellement que dans une société apaisée qui a confiance en ses institutions."
"Après 5 années passées à animer des formations à la sécurité numérique, lancer des actions de plaidoyers, publier des communiqués et des rapports sur la censure et la surveillance en ligne, [Grégoire Pouget -aka Barbayellow-] quitte Reporters sans frontières. Sur Internet, le constat est sans appel : les libertés numériques ont largement reculé."
« Les gouvernements américain et britannique le répètent ad nauseam : Edward Snowden est un traître. Peu importe que l’espionnage massif par l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA) des données téléphoniques, dévoilé par le lanceur d’alerte, ait été déclaré illégal par une cour d’appel de New York. Peu importe qu’une juridiction britannique ait considéré que le troc de renseignements auquel se livrent Londres et Washington contrevenait à la Convention européenne des droits de l’homme. Peu importe que les Nations unies aient adopté, après les révélations de l’ancien consultant de la NSA, une résolution pointant «l’impact négatif de la surveillance de masse» sur les droits humains. Comme tous les précédents lanceurs d’alerte, Snowden est un traître, assènent Washington et Londres. Complaisamment repris par The Sunday Times, puis par une flopée de médias.»
« Western journalists claim that the big lesson they learned from their key role in selling the Iraq War to the public is that it’s hideous, corrupt and often dangerous journalism to give anonymity to government officials to let them propagandize the public, then uncritically accept those anonymously voiced claims as Truth. But they’ve learned no such lesson. That tactic continues to be the staple of how major U.S. and British media outlets “report,” especially in the national security area. And journalists who read such reports continue to treat self-serving decrees by unnamed, unseen officials — laundered through their media — as gospel, no matter how dubious are the claims or factually false is the reporting.»
« les journalistes ne font pas partie de la « population générale », ils sont du côté du pouvoir – doit-on rappeler que l’avocat, en France, est un « auxiliaire de justice ». Voilà à quoi mène la volonté de se singulariser pour se protéger. La loi sur le renseignement est une loi de surveillance généralisée, mais la profession a choisi de faire porter l’essentiel de ses efforts sur la défense corporatiste d’une exception de plus.»